L' intendant fidèle

Ian Na Sporran,  l’intendant fidèle.    
Rothiemurchus  _ Highlands _ Ecosse

Proposé par Lord Blackwood
Traduit par Armanel / 2022


Personnages principaux :
Le chef de clan et sa femme
Ian na Sporran l’intendant fidèle
Ian na Piob, le barde en chef jaloux

Ian Na Sporran

Il y avait autrefois un chef puissant qui dirigeait son clan, loin dans le nord du pays, sur le Loch an Eilein, là où la bruyère pourpre s'étend aussi épaisse sur les collines en été que la neige blanche en hiver, là où les ruisseaux coulent le long des montagnes de granit en charriant de l’or rouge comme la topaze.
Son domaine s'étendit très loin au-delà des collines et des vallées, et s’il était juste en temps de paix, il était féroce en temps de guerre. «Il est dit que les Chefs de clan des Spey et des Garry ont tous deux mangé à sa table, et que Cairn Gorm et Ben Alder lui ont apporté du gibier à sa table »; ce qui prouve que son empire était connu et reconnu dans beaucoup de pays et par beaucoup d'hommes.
Mais il y avait par-dessus tout, deux choses dont le chef de clan était fier  - plus que ses prouesses à la guerre, ou plus que l'étendue de ses domaines et de sa puissance - la beauté de sa femme et son sens inné de la justice. Même si les membres du clan n’étaient pas forcément de son avis; ce qu'il en pensait était suffisant pour lui.
Il faut aussi ajouter qu’il possédait quelque chose qui était rarement accordé aux hommes de pouvoir, mais qui était une bénédiction inestimable pour un chef ou un roi, c’était un intendant fidèle, qui avait la charge de sa bourse, de ses terres et de ses trésors, avec en plus (ce qui n’était pas de la plus petite importance à cette époque) le contrôle total de sa cave.
Ian na Sporran était fidèle à son chef et son chef lui faisait confiance.
Alors, je vous demande : Est-ce qu’il suffit à  quelqu'un d’être bon et fidèle pour se protéger de la jalousie? 
Je ne le pense pas.

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Et le seul fait que Ian na Sporran soit si fidèle et si confiant était suffisant pour créer dans le cœur fourbe de Ian na Piob, le barde en chef, la haine la plus profonde et la plus implacable. Rongé par la jalousie Ian na Piob, n’avait qu’une idée en tête : Comment provoquer la perte de l’intendant.
_ « Cela ne te sert à rien », dit un jour le chef de clan à Ian na Piob; « ça ne te sert à rien de venir hurler dans mes oreilles au sujet de la vilénie de mon intendant. Montre-moi simplement que j'ai perdu l'un de mes sacs de blés, mon or, mon vin, mes bijoux. Alors, j’irai personnellement constater le délit. Je suis tout à fait capable de rendre un jugement équitable, car comme tu le sais je suis un homme juste et ma femme est belle. »
Et toute l’année qui a suivi, Ian na Sporran a servi le chef de clan fidèlement, et pendant l’année entière, Ian na Piob a réfléchi à la manière dont il pourrait le discréditer.
La jalousie de Ian na Piob empirait de jour en jour, et trois jours avant le Nouvel An, lorsque tous les premiers hommes du clan se réunissaient chaque année devant leur chef pour lui rendre hommage et le féliciter, Ian na Piob, réfléchissait plus désespérément que jamais à la manière de piéger Ian na Sporran. 

Le témoignage de la corneille

Ce jour-là, Ian na Piob marchait seul dans la vallée, frappant chaque racine et chaque pierre qui le gênaient et laissant de temps en temps s'exprimer ses sentiments en gémissements envieux. 
_ « Kera kraw », croassa la corneille mantelée de Rothiemurchus. « Quelle est la raison de la douleur qui vous accable? Avez-vous mangé trop de baies mûres? Ou est-ce autre chose qui vous fait si mal? »
Ian na Piob leva les yeux et vit la corneille mantelée; et il se dit que son œil noir exprimait un cœur aussi méchant que le sien, alors il lui raconta son histoire.
_ « Ce n’est que cela? » demanda la corneille mantelée. « Pourquoi ne dites-vous pas qu'il a volé la belle orge dorée du chef ? »
_ « Premièrement parce que je ne peux pas voler l'orge moi-même; et deuxièmement, parce que je n'ai aucun témoin pour me soutenir si je ments à ce sujet », a répondu Ian na Piob.
 _ « Vous êtes aussi sot qu’une pie! » Croassa la corneille mantelée; « Qu'êtes-vous prêt à me donner si je comparais comme témoin en votre nom? »
_ « Un sac de haricots que j’irai récolter dans mon propre jardin et des friandises que j’irai voler à la table du chef de clan», s'exclama Ian Na Piob.
_ « Kera kraw! Marché conclu », a chanté la corneille mantelée. «Apportez-moi les haricots et les friandises demain. Puis appelez-moi quand vous aurez besoin de moi, et je serai présente sans faute ».
Ian Na Piob a donné les haricots et les sucreries, et le matin de la nouvelle année est arrivé. Des foules de courtisans ont envahi le grand hall du château; les gens venaient complimenter le chef et sa dame, et recevoir leurs ordres pour l’année à venir. Ian na Piob était parmi eux et se prosterna en signe d'obéissance.
_ « As-tu quelque chose à me dire? » demanda le chef de clan. « Des plaintes? Des conseils? Des souhaits? Je suis un homme juste, et ma femme est belle; parle sans peucrainte. »
_ « Ian na Sporran a volé votre orge dorée, chef! » s'écria Ian na Piob, « et il mérite d’être mis à mort. »
_ « As-tu un témoin? » demanda le chef de clan de clan. « Rappelles toi que je suis un homme juste, et que ma femme est belle et que je ne peux pas juger sans preuve.»
_ « Mon témoin est la corneille mantelée de Rothiemurchus », répondit Ian na Piob, «  Son témoignage est formel »
_ « Eh bien, dans ce cas, Ian na Sporran, » remarqua le chef de clan en se tournant vers lui, « tu dois mourir. »
_ « Pourquoi Votre Altesse n'appelle-t-elle pas le témoin afin qu’elle prouve la véracité de ses dires avant de me condamner? » demanda Ian na Sporran. « Si je suis déclaré coupable, je suis prêt à mourir! Mais si je suis innocent, votre sens de la justice et la beauté de votre femme interdisent que je sois puni à tort. »
_ « Je suis un homme juste et ma femme est belle », répondit le chef de clan. « Vous avez raison Ian na Sporran.  Que Ian na Piob, fasse venir son témoin. »
Ian Na Piob a sifflé trois fois, et la corneille mantelée de Rothiemurchus apparut à la fenêtre.

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_ « Prêtez serment, corneille mantelée », dit le chef, « certifiez- vous que Ian na Sporran a volé mon orge dorée? »
 _ « Je le jure, » dit la corneille mantelée.
_ « Comment en êtes-vous si sûre? » demanda le chef de clan.
_ « Parce que, » croassa la corneille mantelée, sans hésiter, « Ian na Sporran m'en a donné à manger ce matin même pour m'empêcher de déclarer son forfait, car il savait que je l'avais vu le faire. Regardez comment mon ventre est distendu. Il est  plein, plein, plein! »
_ « Cette corneille mantelée semble dire la vérité! » dit le chef de clan en regardant Ian na Sporran, « vous devez mourir! »
_ « Je vous prie de bien vouloir ouvrir le témoin en deux pour voir s'il dit la vérité », a déclaré Ian na Sporran.
_ « Je vais le faire », dit le chef de clan, « car je suis un homme juste, et ma femme est belle. »
Alors ils ont ouvert la corneille mantelée et n'ont rien trouvé à l'intérieur, à part du sucre et des fèves. Ensuite, ils ont jeté la carcasse par la fenêtre dans le Loch an Eilein où vivait Spottie Face, le grand saumon, qui l’avait mangé en une gorgée.
_ « Ce témoignage est un non-sens! » rugit le chef de clan. « L'affaire est classée; allons souper. » 
Le chef et ses vassaux entrèrent donc souper et, dans les délices de la salle de fête, ils oublièrent tous le tracas de cette journée.
S'il y avait un homme en colère dans tout le district, c'était Ian na Piob. Mais cet échec ne lui a pas fait renoncer à ses mauvaises intentions, et, pendnat toute cette nouvelle année il réfléchit à un nouveau plan pour amener Ian na Sporran au gibet.

Le témoignage du soleil

Trois jours avant le Nouvel An, Ian na Piob se promenait dans les pinèdes de Dalwhinnie. Il écrasait sauvagement les cônes tombés au sol l'année dernière avec son pied dans le sol glacé. De temps en temps, il poussait de grands cris de colère.
_ « Quelle est la raison de ce tumulte? » demanda la sorcière noire de Loch Ericht,  assise à l'entrée de sa caverne obscure, clignant des yeux dans la fumée bleue du feu de tourbe qui tourbillonnait dans la caverne, fumée puante comme la fumée qui sort de la gueule d'un dragon.
Ian na Piob leva les yeux. Et comme la sorcière lui semblait aussi noire et aussi perverse que lui, il ne tarda pas à lui raconter son histoire.
_ « Pourquoi ne dites-vous pas qu'il a volé l'or du chef?», dit-elle.
_ « Parce que je ne peux pas voler l'or moi-même, et je n'ai aucun témoin prêt à jurer pour moi, si j'en avais besoin. »
_ « Tu es aussi stupide et peureux qu’un lapin! » cria la sorcière avec mépris. « Qu'es-tu prêt à me donner me donner si le soleil apparaît en tant que témoin? »
_ « Tout ce que tu voudras », a déclaré Ian na Piob.
_ « Et bien, si nous voulons le soleil », répondit-elle, « Je dois préparer du bouillon de trolls pour l'attirer. Donne-moi le petit orteil de ton pied droit et le petit orteil de ton pied gauche. Je pense que cela fera l'affaire. »
Il faut avouer que Ian na Piob était affligé de perdre ses petits orteils et de souffrir. Mais  que ne ferait pas un envieux pour vaincre un ennemi?
Alors il coupa le petit orteil de son pied droit et le petit orteil de son pied gauche et les donna à la sorcière de Loch Ericht pour qu'elle prépare le bouillon des trolls.
_ « Maintenant, » dit Ian na Piob, « Je ne peux plus marcher. »
 _ «  Ce n’est pas un problème » répondit la sorcière; « Vous aurez ma béquille et vous vous en tirerez assez bien. »
Et elle poussa un grognement et renifla deux fois comme une trompette. Alors un être étrange sortit de derrière les buissons de genièvre et lui donna la béquille de la sorcière.
_ « Reviens ici demain, et le bouillon sera préparé; puis prends-le le matin du Nouvel An et, marche dans le sens contraire des aiguiles d’une montre autour des pierres dressées de Trium, et jette-le bouillon sur le sol lorsque le soleil se lèvera. Et il viendra témoigner le jour du Conseil. »
Alors la sorcière entra dans la grotte, et Ian na Piob se traîna en boîtant.

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Le lendemain matin, il arriva très très tôt, vous pouvez me croire, et appela la sorcière. L'être étrange sortit de derrière les buissons de genièvre et lui donna le bol rempli de bouillon de trolls.   Ian na Piob  l’emporta et fit tout comme la vieille sorcière lui a avait demandé.
Il est dit qu’une foule nombreuse est venue pour le Nouvel An et s'est rassemblée dans le hall du château pour féliciter son chef et sa femme et pour goûter de bonnes choses à son buffet!
Et après que beaucoup eurent parlé et que beaucoup d’affaires aient été traitées, Ian na Piob, voyant que son tour était venu, s’avança lourdement, s’appuyant sur la béquille qu’il avait reçue de la vieille sorcière.
_ « C’est votre tour de parler, Ian na Piob? » dit le chef de clan. « Si vous avez quelque chose à dire, dites-le. Je suis fatigué et j’ai faim, alors faites vite. »
_ «Voila, » répondit Ian na Piob, « Cet homme là-bas - Ian na Sporran - a recommencé! Il a volé vos pièces d'or et il devrait mourir. »
_ « Je suis un homme juste, et ma femme est belle, et je ne peux pas te croire sur parole, tu le sais. Si tu n’as pas un témoin crédible, et pas une corneille menteuse, je te prie de te retirer ! »
_ « Monsieur, mon témoin n'est autre que le soleil lui-même », a répondu Ian na Piob.
_ « Oh, » dit le chef en se tournant vers Ian na Sporran, « Si tel est le cas, vous devez certainement avoir la tête coupée. »
_ « Monsieur, » dit humblement Ian Sporran, « ordonnez-lui de faire comparaître son témoin. Et si je suis coupable, faites-moi mourir. »
_ « Je suis un homme juste, et ma femme est ------ Mais quelle est cette calamité qui  nous tombe dessus? » demanda le chef à Ian Da Piob, s’arrêtant brusquement au milieu de la phrase bien connue.
_ « Le gel » grogna Ian na Piob. « Mais suivez-moi chef, et vous aussi messieurs, à la chambre qui regarde vers le sud-ouest, et ensuite je prouverai que mon accusation est vraie. »
_ « Pourquoi la chambre au sud-ouest? » demanda le chef de clan.
_ « Parce que », répondit Ian na Piob, «  c’est là que l'argent volé est caché, et mon témoin va le prouver. »
_ « Allons-y, » cria le chef de clan, « et ne perdons pas de temps, car j'ai très faim. »
Ian na Piob est donc allé vers la chambre qui regarde vers le sud-ouest. En pénétrant dans la salle, tout le monde vit le soleil qui brillait, à travers la fenêtre, sur de nombreuses pièces d’or qui s’entassaient sur  le sol.
_ « Capitaine, faites votre devoir! » cria le chef de clan en désignant Ian na Sporran.
_  « Chef, je vous prie, avant de me faire mourir, prenez une de ces pièces, regardez-la dans l'ombre, et dites-moi si elle est vraiment dorée ou pas!"
_ « Je suis un homme juste et ma femme est belle », a déclaré le chef de clan. « Donne-moi une de ces pièces d'or. »
Alors ils lui tendirent une pièce de monnaie et, la plaçant dans un coin à l’ombre de la lumière du soleil, il s'aperçut que c'était une pièce de monnaie courante et non pas du tout d'or.
_ « Si je tenais votre témoin en mon pouvoir, » dit le chef de clan à Ian Na Piob, « je le rosserais! Quant à vous, votre punition viendra après le souper. »
Puis le chef prit Ian na Sporran par le bras et se précipita dans la salle des banquets, car il avait très faim et ne voulait plus attendre.
Cette fois encore, Ian na Piob a échappé à sa punition bien méritée, car dans les délices du festin, le mal du matin a été oublié. Car tout cela était si bête, que cela ne valait pas la peine de le faire remarquer ou même de s'en souvenir.

À quel point Ian na Piob était-il en colère après ce deuxième échec, vous pouvez certainement l’imaginer. Il n'avait pas pu se venger de Ian na Sporran et avait perdu deux points auprès du chef de clan.

Le témoignage de la lune

_ « Je retournerais voir cette vieille sorcière l’année prochaine! » a-t-il dit. « Si elle ne m'aide pas mieux que la dernière fois, elle sera brûlée ou je ne m’appelle pas Ian na Piob ! »
La nouvelle année arrivait, et Ian na Piob savait que c'était sa seule opportunité de réussir à se venger de Ian na Sporran. Il se rendit à  la caverne et appela bruyamment la sorcière. Mais quand elle répondit et vint à l'entrée de la grotte, elle avait l'air si perverse que son courage l’abandonna, et ses mots colèriques se transformèrent en un faible gémissement plaintif.
_  « Oui ? » dit la sorcière, « qu'est-ce qui vous ramène ici? »
_  « Le misérable échec de votre stratagème », a sangloté Ian na Piob, puis il lui a raconté tout ce qui s'était passé.
_ « Et à qui la faute, je voudrais bien le savoir? » gronda-t-elle. « Et tu voudrais que j’imagine un autre plan qui conviendrait à une oie sotte telle que toi. Eh bien, c’est non! Tu es un si bête  que tu ferais tout rater. Alors sois tranquille, je ne prendrai plus aucune peine pour toi. »
_ « Donnes-moi un plan, je t'en prie! » cria Ian na Piob, toute douleur et toute déception perdues dans l’espoir d’une revanche. « Je donnerai n'importe quoi pour amener Ian na Sporran dans une mauvaise passe! »
_ « Eh bien, si vous me rapportez quelques friandises de la table du chef de clan, nous  déclarerons, cette fois,  qu'il a volé le vin du chef. »
_ « Mais je n'aurai pas de témoin », gémit Ian na Piob. « La corneille mantelée est morte, et le soleil ne m’a servi à rien; que dois-je faire? »
_ « Lapin idiot! » grogna la sorcière. « Nous aurons la lune comme témoin, mais nous devons lui préparer un bouillon de trolls, sinon nous n’arriverons à rien. Donnez-moi le gros orteil de votre pied droit, et le gros orteil de votre pied gauche. Je pense que cela fera l'affaire. Ou alors partez et ne revenez plus »
Et Ian na Piob a pensé que, comme il avait déjà perdu ses petits orteils, ses plus gros pourraient tout aussi bien servir à ses plans. Alors il les a coupés et les a donnés à la sorcière.
_ « Waouh Waouh Waouh! » cria-t-il de douleur. « Maintenant, je ne peux plus marcher, pas même avec la béquille! » Et il s'assit par terre et agita ses pieds sans orteils dans tous les sens.

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_ «  Cela suffit maintenant » dit la sorcière, « ne restez pas ici à gémir comme un bébé. »
Et elle poussa un grognement et renifla deux fois comme une trompette. Un être étrange sortit de derrière les buissons de genièvre et lui tendit un long et large jupon en soies de porc raides, et quand Ian na Piob l'eut noué avec des lanières de cuir, il était soulevé de tous les côtés et pouvait se déplacer sans ses orteils.
_ « Tu es très joli », dit la sorcière avec une horrible grimace.
_ « J'aurais aimé que tu sois à ma place », se dit Ian na Piob, alors qu'il marchait du mieux qu'il pouvait. « Je viendrai demain avant le coucher du soleil pour le bouillon. »
Et le lendemain soir, avant que les ombres ne sortent de la forêt de sapin et ne se répandent sur les collines, Ian na Piob se trouvait à nouveau à l'entrée de la caverne. Et l’être étrange est venu de derrière les buissons de genévrier et a remis entre ses mains le bol de bouillon de trolls que la sorcière avait préparé entre-temps.
_ « Va vers le rocher d'Osinn », dit la sorcière, « là, où le pin flétri étend ses branches nues vers le ciel. Quand la lune se lèvera, marche trois fois dans le sens contraire des aiguilles d’une montre autour du tronc déchiqueté, et jette le bouillon sur le sol devant elle. »
Ian na Piob s'éloigna péniblement vers le rocher d'Osinn, tenant le bol de bouillon dans une main et s’appuyant sur la béquille de l'autre, son corps soutenu par le jupon en soies de porc. Et il a fait comme la sorcière lui avait demandé ; lorsque la lune se levait sur les rochers de Braeriach, il jeta le bouillon par terre devant elle, l'invitant à venir le lendemain pour être son témoin lorsqu'il l’appellerait.
Le lendemain, lorsque le Nouvel An arriva et que tous les serviteurs et les vassaux s'assemblaient au château pour saluer et recevoir des conseils, Ian na Piob les accompagna, vêtu de son jupon de soies de porc, regardant son pire ennemi et pensant à sa plus cruelle vengence.
_ « Quel charlatan avons-nous ici? »  a déclaré Le chef de clan à la fin du conseil, quand Ian na Piob a fait s’est avancé pour faire sa déclaration.
_ « Hélas! Noble monsieur, c’est la morsure du gel qui a pris possession de mes membres. Mais quelle que soit la douleur que je ressens, je suis venu ici pour dénoncer ce méchant Ian na Sporran, et vous demander, au nom de la justice, qu'il soit immédiatement mis à mort. »
_ « Comment ? Maintenant ? » s'écria le chef de clan, « je suis un homme juste, et ma femme est belle, et je ne condamnerai pas un homme sans preuve ni témoin. Dites-ce que vous avez à dire, mais méfiez-vous, ne vous moquez de moi cette fois! »
_ « Il a volé votre vin et je peux le prouver », a déclaré Ian Na Piob.
_ « Volé mon vin! Oh, en effet, il faut y mettre un terme», dit le chef de clan en se tournant vers Ian na Sporran, « Vous devez être chatié »
_ « Encore une fois, chef, » dit Ian na Sporran, « écouterez-vous mon ennemi sans preuve? »
_ « Non, » répondit le chef de clan.
_  « Il ne faut pas douter de ma propre justice et de la beauté de ma femme. Qui est votre témoin? » Continua-t-il brusquement en regardant Ian na Piob.
_ « La lune, » dit-il, « et personne d’autre. Le vol a été fait pendant la nuit et la lune viendra à côté de moi et en donnera la preuve. »
_ « La lune soit louée! » a crié le chef de clan, «  Mais, elle ne peut pas venir maintenant car il est trop tôt. Donc que je peux avoir mon dîner en premier. » 
Alors sans plus de cérémonie, le chef sortit de la salle pour se rendre dans la pièce où le festin avait été organisé et, dans le plaisir du festin, il oublia bientôt les affaires du matin.
Mais quand ils eurent tous mangé ce qui était bon pour eux et avaient bu, à mon avis, plus qu'il n'était nécessaire, Ian na Piob se précipita vers le chef et le pria de se rendre dans la tour du nord-ouest, car son témoin attendait pour prouver son accusation.
_ « Tout cela m’ennuie profondément » dit le chef de clan. « Coupez-lui la tête! Cela m’est égal, et je n’ai pas besoin de preuve. »
_ « Noble maître », dit Ian na Sporran,  « souvenez-vous que vous êtes un homme juste et que votre femme est belle. »
_ « Que la peste emporte toute cette affaire! » rugit le chef de clan en se levant. « Je ne peux même pas prendre mes repas en paix! Je suppose donc, que je dois faire ce procès. Mais celui qui se moquera de moi est un homme mort! »
Alors, en colère, il a pressé Ian na Piob, lui donnant parfois un coup de pied dans le derrière pour le faire avancer plus vite, suivi de sa dame et de ses courtisans, qui étaient tous impatients de voir ce qui allait se passer maintenant.
Eh quand ils sont arrivés à la tour nord-ouest, ils entrèrent dans la chambre. Ils y virent des cuvettes, des vases et des gobelets disposés sur le sol et les tables, et remplis de vin rouge foncé. Il n’y avait ucun doute là-dessus, car la lune brillait à la fenêtre et était presque aussi brillante que que le soleil de midi.
_ « J'en ai vu assez! » cria le chef de clan. « Ian na Sporran, à genoux, et toi le porteur d'épée, donne-moi Claymore, mon épée fidèle! Tu as volé ma boisson, n’est-ce pas? Je vais te couper la tête, tu n'auras plus jamais soif ! »
_ « Je vous en prie, mon seigneur », dit Ian na Sporran en tombant à genoux, « goûtez ne serait-ce qu'une goutte de ce vin. Accordez-moi cette dernière demande avant de mourir. Je ne ferai aucune résistance; accordez-moi seulement ce petit privilège. »
_ « Vous ne le méritez pas, mais je le ferai », répondit le chef de clan en prenant un des verres et en le plaçant à ses lèvres, « car je suis un homme juste, et ma femme est --- - Ah, beurk !!! »  Et avec une grimace de dégout, il cracha le liquide sur le sol.
_ « Qu’on me donne de l'eau, du vin, du cidre, n'importe quoi pour m’ôter le goût de la bouche! Oh, ah ah! Ouf! On m’a empoisonné, je vais mourir! » Cria le chef de clan se précipitant hors de la pièce  en  dispersant ses vassaux de tous côtés et en fracassant la porte. « Enfermez Ian na Piob! Il mourra demain, au matin avant le chant du coq! » 
Mais le chef n’était pas du tout empoisonné, car c’était seulement de l’eau croupie que Ian na Piob avait versée dans les gobelets. Eau qui semblait violette au clair de lune. 

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C’est ainsi que Ian na Piob a été mis sous clé dans le cachot situé au-dessous du fossé. Comme il devait être exécuté le lendemain matin sans faute, un gardien a été chargé de s'assurer qu'il ne s'échapperait pas.
Mais Ian na Piob s'est arrangé pour envoyer à la femme du chef de clan un message lui indiquant qu'il avait une chose de très grande importance à lui confier, en lui disant que, même s'il devait mourir, c'était une vraie pitié qu'un secret si grand soit perdu. Et qu’elle pouvait écouter sans risque par le trou de la serrure, pendant qu’il lui parlait de l’autre côté de la porte.
La femme du chef de clan a pensé que cela ne pouvait causer de tort à personne et, de plus, le chef de clan n'avait pas besoin de savoir quoi que ce soit à ce sujet. De plus, elle était aussi curieuse qu'un singe, et ne pouvait lutter contre sa curiosité. C'est ainsi qu'à minuit, elle corrompit le geôlier et se rendit au cachot où Ian na Piob était enfermé. Là, elle donna trois coups sur les poutres de chêne, et elle posa son oreille sur le trou de la serrure de la grande porte.
Ce que Ian Na Piob a dit à cette dame ne vous regarde pas, pas plus que moi. Mais ce qu'il lui a dit devait avoir une importance considérable, dans la mesure où elle s'est immédiatement adressée au chef, son mari, pour le prier de différer l'exécution de Ian na Piob de trois jours. Le chef de clan, qui avait repris son sang-froid, y consentit en râlant pour la forme, car sa femme était non seulement belle mais, quand elle avait quelque chose en tête, il savait pertinemment qu'elle n’abandonnait jamais. Oui, le pauvre homme ne le savait que trop bien, grâce à sa longue expérience à ses côtés! D'où son consentement. Et c'est ce qui s’est réellement passé, puisqu'il était impossible pour Ian na Piob de s'échapper avec ses membres gelés, comme il disait. Le geôlier lui a permis de se promener librement dans le château, car il ne voulait pas rester assis en face de ce cachot trois jours entiers, et était heureux de pouvoir aussi être éloigné de son prisonnier de temps en temps.

Le témoignage des étoiles

Des pensées douloureuses traversaient l’esprit de Ian na Piob et il tremblait de peur à la pensée de la triste fin qui lui était promise. Mais son désir de vengeance était un feu éternel qui brûlait dans son cœur.
_ « Oh, si je pouvais seulement arriver d'une manière ou d'une autre à la mort de cet homme, je mourrai heureux!» S’écria-t-il, et il a mordu son doigt jusqu’à l'os alors qu'il s'accroupissait dans l'escalier et pensait, pensait, pensait.
Et, assis dans les escaliers, Ian na Piob leva les yeux au ciel et vit la lune voguant dans le ciel bleu glacial qui le regardait à travers la grille ouverte. Il lui montra le poing et la traita de tous les noms. Les étoiles qui apparaissaient l’une après l’autre, clignaient de l'œil tellement elles étaient choquées par cette conduite. Mais alors qu’il les regardait, une pensée rusée lui traversa l’esprit et il se leva soudainement. Avec un sourire diabolique sur le visage, il prit dans sa main un gobelet de cristal posé sur la table à côté de lui et avec avec l'aide de la béquille et du jupon rigide, monta péniblement l'escalier en colimaçon. Puis, il entra dans une chambre orientée vers le sud et, après avoir verrouillé la porte de l'intérieur, il s'assit sur un tabouret posé devant les fenêtres ouvertes. Puis il referma les persiennes qui étaient de chaque côté du vantail, et prenant un poinçon pointu de sa poche, pendant deux heures, il travailla à percer des trous à travers eux, certains larges, d’autres petits. Il les transperçait en lignes droites et en cercles afin de représenter, du mieux qu'il pouvait, la voie lactée qu'il avait souvent robservée dans les cieux d'hiver.
Ensuite, il cassa le verre de cristal avec sa béquille en petits morceaux qu’il jeta sur la table sous la fenêtre fermée. Puis il quitta la pièce avec une grimace de plaisir, fermant la porte à clé derrière lui, et emportant la clé avec lui.
_ « Maintenant la clé », murmura-t-il.
_ « Spottie Face! Spottie Face! Spottie Face! » Cria-t-il en se levant du mieux qu'il pouvait sur le rebord de la fenêtre de sa chambre et en tendant le plus loin possible son cou au-dessus de l'eau du Loch an Eilein en contrebas. « Spottie Face, viens ici! »
Et Spottie Face, le grand saumon qui avait sa résidence le lac, leva les yeux, s'attendant à recevoir de la nourriture.
_ « Spottie Face! O Spottie Face! » Continua Ian na Piob, « si je te donne des friandises de la table du chef, me rendras-tu une faveur? »
Spottie Face était une bête méchante et cruelle et n'aimait faire des faveurs à personne; mais rappelez-vous que c'était l'hiver et qu'il n'y avait pas beaucoup de nourriture ou d’herbe fraîche sur les berges, alors il plaça son nez au-dessus de l'eau et fit signe de son consentement avec sa queue.
_ « Prenez cette clé et déposez-la sur la rive en dessous de la fenêtre de Ian na Sporran. Elle se trouve de l’autre côté du château. C’est peu vous demander. Vous n’avez qu’à obéir et ce soir je jetterai les douceurs de cette fenêtre dès que le chef de clan aura quitté la salle de banquet.»
Alors Lan Na Piob jeta la clé à Spottie Face et descendit l'escalier.
Mais Spottie Face, quand il saisit la clé, le trouva très froide, car le gel avait embrassé le métal, et il la cracha sur la rive, juste en face de l'endroit où il l'avait reçue, et la clé sombra sur la neige gelée sous la fenêtre de Ian na Piob.Puis Spottie Face a plongé au fond du lac.
Le jour fatal arriva alors où Ian na Piob devait mourir à cause de sa tromperie diabolique envers le chef de clan. Le geôlier vint et le mena dans le hall du château où tous étaient assemblés. Le chef de clan et sa femme étaient assis sur leur trône afin d’assister à la sentence.

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_ « Je suis un homme juste et ma femme est belle », a déclaré le chef de clan. « Vous m'avez trompé et vous avez essayé de m'empoisonner: vous allez mourir maintenant, c'est décidé! »
_ « Accordez-moi une dernière volonté avant de mourir! » s'écria Ian na Piob. « Laissez-moi mais murmurer un secret de la plus haute importance à l'oreille de votre dame. »
_ « Rien du tout! » rugit le chef. « Qu’on lui coupe la tête! Je n’accorde aucun délai. »
Mais sa femme voulait de connaître ce secret, quoi qu’il puisse être.  Car elle y pensait depuis deux jours et s’était en outre beaucoup penchée sur le sujet. Alors elle a décoché à son mari un de ses regards. Et le chef de clan  conaissait trop bien ce regard pour pouvoir dire non quand elle voulait qu’il dise oui.
Alors Ian na Piob murmura à son oreille.
_ « Quoi? Quoi? Mes bijoux, mes beaux bijoux? » A crié la femme du chef et, serrant les poings, elle a couru jusqu'à Ian na Sporran et s'écria: « Rendez-moi mes bijoux, voleur. Rendez-moi mes beaux bijoux que vous avez volés! »
_ « Qu'est-ce que c'est que cette histoire? » demanda le chef de clan en sautant d'un bond de son fauteuil.
_ « Eh bien, Ian na Piob dit que Ian na Sporran a volé mes bijoux! O mon cher mari, vous devez envoyer immédiatement Ian na Sporran à la potence. »
_ « Chut, doucement, mon amour! » a dit le chef de clan. « Vous êtes belle, mais souvenez-vous que vous devez aussi être juste. En vérité, je ne crois pas un seul mot de ce que vous dites. Et en ce qui concerne Ian na Piob, témoin ou pas témoin, je ne lui ferai plus jamais confiance, c'est dit! »
_ « Combien de témoins vous faudrait-il pour me croire? » a déclaré Ian na Piob. « Est-ce que dix suffiriraient? »
_ « Non! » rugit le chef de clan. « Rien de moins que vingt, alors tu ne seras peut-être pas pendu! »
_ « Il y en a vingt qui attendent pour témoigner en ce moment dans le château », s'est écrié Ian na Piob.
Le chef de clan s’est dit que Ian na Piob l’avait pris à son propre piège et savait que s'il voulait ne pas perdre la face, il devait consentir à ce que sa cause soit entendue.
_ « Et qui sont ces témoins? » gronda-t-il.
_ « Nul autre que les étoiles du ciel », a répondu Ian na Piob.
_ « C'est un piège pour échapper à ton destin jusqu'à ce soir! » dit le chef de clan.
_ « Non, elles vous attendent en ce moment même dans la chambre sud », a déclaré Ian na Piob; « Et en plus, les bijoux sont là aussi », murmura-t-il à l'oreille de la femme du chef.
_ « Viens, viens! » cria-t-elle en saisissant le chef par la manche et ils suivirent Ian na Piob vers la porte, car le chef savait qu'il devait suivre, bon gré mal gré, car sa femme lui semblait devenir folle.
_ « Mais où est la clé? » demanda le chef de clan quand il arriva à la porte et la trouva verrouillée, « C’est encore une ruse de ta part, »
_ « Seuls ceux qui cachent peuvent trouver! C’est lui qui l'a, bien sûr », dit Ian na Piob en désignant Ian na Sporran, « fouillez-le. S'il ne l'a pas, c’est qu’il l'a cachée dans sa chambre; et si ce n'est pas le cas là, il l'a jetée par la fenêtre. Oh, je connais ses tours! »
_ « Mais alors pourquoi est-elle là, sur la rive! » dit l'un des partisans du chef en regardant par la fenêtre. Et la clé était là, sur la rive juste sous la fenêtre de la chambre de Ian na Piob.
Alors ils ont couru et sont allés le chercher. Ian na Piob faillit s'évanouir de rage, car il vcomprit que Spottie Face le saumon l'avait trompé.
A présent, la porte était grande ouverte et il ne faisait aucun doute que les joyaux gisaient sur la table et sur le sol, étincelant à la lumière des étoiles qui brillaient à travers la fenêtre pour éclairer la pièce sombre.
_ « Mes bijoux, mes bijoux! » cria la femme du chef en courant.
_ « O Ian na Sporran, » dit le chef de clan en secouant la tête, « cette fois vous êtes fait! Vous allez être pendu »
_ « Oui, oui, » s'écria sa femme, « tout de suite! Tout de suite! Car il le mérite. »
_ « Je vous prie, noble chef », a déclaré Ian na Sporran, « interrogez les témoins et demandez-leur la vérité. »
_ « Tu parles sans réfléchir. Ils sont à des milliers de kilomètres » dit le chef. « Comment pourraient-ils m'entendre? »
_ « Ils ne sont pas plus loin que l’autre côté de la fenêtre », a répondu Ian Na Sporran. « Permettez-moi d'aller les saluer. »
_ « Arrêtez-le, ne le laissez pas faire un pas! » hurla Ian na Piob, avançant dans son jupon pour l'empêcher. « Il va nous jouer un mauvais tour! »
_ « Tu sembles oublier les tours que tu m’as joué, Ian na Piob! » tonna le chef de clan « Et tu oublies aussi que je suis un homme juste et que ma femme est belle. Ian na Sporran, va les saluer. »
Ian na Sporran se dirigea vers la lucarne et ouvrit le rideau. La lumière du jour emplit la chambre. Tous levèrent la main aux yeux, car ils étaient éblouis par le changement soudain.
_ « Chère dame, » dit Ian na Sporran, « regardez maintenant vos bijoux! Rien que du verre, voyez-vous, et où sont les témoins de mon ennemi? Je pense qu'ils dorment encore dans les coffres obscurs de la nuit, de l'autre côté de l'océan. »
_ « lan na Sporran, pardonne-moi et à nous tous! » dit le chef de clan en s'avançant et en lui serrant la main. « Nous ne douterons plus jamais de vous, aussi longtemps que nous vivrons. Demandez-moi une faveur, et elle sera accordeé. »
_ « Alors accordez-moi la grâce de Ian na Piob », cria Lan Na Sporran; « Car, je suis aujourd'hui l'homme le plus heureux du pays, et je ne pourrais pas que mon bonheur soit entaché par la mort de mon ennemi.»
_ « À une condition, » répondit le chef du clan. « Ian na Piob, agenouillez-vous et, les deux mains levées, jurez que vous n'essaierez plus jamais de donner un faux témoignage ou de me mentir à nouveau. »
Ian na Piob s'est agenouillé et a voulu lever ses deux mains au dessus de sa tête. Mais, en lachant la béquille de la sorcière, il est tombé à plat ventre devant le chef. Il ne pouvait plus se relever.
_ « Vous avez signé votre propre destin », dit le chef du clan. « Qu’on  le jette dans le lac. La pendaison serait trop douce pour lui! »
Alors, ils ont jeté Ian na Piob, le jupon, la béquille et tout le reste, par la fenêtre dans le Loch an Eilein en contrebas, là où Spottie Face avait élu domicile, et Ian na Piob n’avait pas atteint le fond du lac que Spottie Face ne l’ait avalé, jupon et tout
_ « Mon chéri, » dit sa femme au chef du clan, « Je vois que tu es aussi intelligent que tu es juste », et elle le lui donna un baiser sur sa joue droite.
_ « Et toi, mon amour », dit-il, ravi, « tu es aussi sensible que tu es belle. »
Et avec ces mots, il lui donna un baiser sur la joue gauche, ce qui était vraiment très bon de sa part, car n’oubliez pas que le chef de clan était un homme juste et sa femme était belle.

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