Manawyddan fils de Llyr
MANAWYDDAN LE FILS DE LLYR
VOICI LA TROISIÈME PARTIE DU MABINOGI
Manawyddan the son of Llyr
Traduction par Armanel - conteur _ décembre 2021.
Merci de bien vouloir lire les notes ci dessous avant de lire ce conte
Note 1: Les notes générales concernant les Mabinogion se trouvent en préface de :
La dame de la fontaine
Note 2: Ce texte étant assez long, je me suis permis de le diviser en quelques chapitres,
afin de permettre au lecteur de faire des pauses.
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Principaux personnages :
Manawydan Fab Llyr (Manawydan, fils de LLyr) est un héros de la mythologie galloise.
Il semblerait que son nom écrit sous la forme Manawyddan soit erroné, et que Manawydan soit plus conforme.
Manawydan est l'équivalent gallois du dieu irlandis Manannan Mac Lir. Son nom voudrait dire « le Mannois », en référence à l’île de Man, dont certains voient en lui la divinité principale.
Il a pour frère Benigued Vran, pour sœur Branwen. Et il va épouser Rhiannon (veuve de Pwyll).
Je me suis permis de traduire Gorsedd par Cromlec’h (Monument mégalithique formé de menhirs placés en cercle.).
L’histoire :
Après le retour de la bataille en Irlande (voir Branwenn, fille de LLyr), et suite au décès de Pwyll, son père (Voir Pwyll, prince de Dyved), Pryderi invite Manawydan à venir vivre avec lui en Dyfed et d’épouser Rhiannon sa mère. Mais ils s’aperçoivent qu’un sortilège a provoqué la disparition du peuple de Dyved( Sud-Ouest de l’actuel Pays de Galles), laissant seuls Manawydan, Rhiannon, Pryderi et sa femme Kicva dans le pays désert. Pendant quelque temps Ils survivent en chassant, puis vont en Loegrie (Actuelle Angleterre) s’installer comme artisans. La qualité de leur travail rend les autres artisans jaloux et ces derniers veulent leur mort. Lassés de ces querelles, ils retournent en Dyved.
Puis Pryderi et Rhiannon disparaissent. Manawydan et Kicva retournent vivre en Angleterre et une fois encore ils sont chassés par des artisans. Manawydan rapporte avec lui du blé pour le cultiver. Quand arrive le temps des moissons, la récolte est dévorée par des souris. Il en attrape une et décide de la pendre. Trois étrangers arrivent, successivement, et lui proposent de l’argent en échange de la vie de l’animal. Manawydan refuse à chaque fois, mais parvient à persuader le dernier de ces trois hommes, un évêque, d’exorciser le Dyfed et de délivrer Pryderi et Rhiannon.
Cet étranger déclare s’appeler en vérité Llwyd fab Cil Coed et avoue que c’est lui qui a ensorcelé le Dyved et capturé Rhiannon et Pryderi pour se venger de l’insulte faite par Pwyll (père de Pryderi et premier époux de Rhiannon) à son ami Gwawl.
VOICI LA TROISIÈME PARTIE DU MABINOGI
1 _ Manawyddan et Rhiannon.
Lorsque les sept hommes dont nous avons parlé dans le livre précédent (Branwen, fille de Llyr) eurent enterré la tête de Bendigeid Vran sous le Mont Blanc à Londres, la face tournée vers la France, Manawyddan contempla la ville de Londres puis se retourna vers ses compagnons. Il poussa alors un grand soupir car beaucoup de chagrin et de lourdeur d’âme s'abattaient sur lui.
_ « Hélas, ciel tout-puissant, malheur à moi », s'écria-t-il, « je suis le seul être au monde à ne pas avoir un lieu pour me reposer cette nuit. »
_« Seigneur », dit Pryderi, « pourquoi es-tu si triste. Il est vrai que ton cousin s’est déclaré roi de l'île des Puissants, et bien qu'il ait mal agi envers toi, tu dois admettre que tu n'as jamais revendiqué ni terres ni droits à la couronne. Tu n’es que prince de troisième rang et te voici déshérité ».
_ « C’est vrai », répondit Manawyddan, « mais bien que cet homme soit mon cousin, cela me bouleverse de le voir sur le trône de mon frère Bendigeid Vran. Je ne pourrais jamais être heureux près de lui, sous son autorité. »
_ « Accepterais-tu le conseil d'un ami ? » demanda Pryderi.
_ « J'ai vraiment besoin d'un conseil avisé », répondit Manawyddan, « mais quel pourrait être ce conseil ? «
_ « Ecoutes-moi : Je possède sept domaines (Cantrev) », dit Pryderi, « Rhiannon, ma mère, y demeure. Si tu le veux, je t’accorde sa main et je te donne aussi la sujétion des sept Cantrev. Et même si tu ne possèdes, en tout et pour tout, que ces sept Cantrev, tu ne pourrais pas rêver sept Cantrev plus beaux qu'eux. Bien sûr je partage tous mes biens avec ma femme Kicva, la fille de Gwynn Gloyw, mais l'héritage des Cantrev m'appartient en propre, et tu pourras en profiter avec Rhiannon. Et si jamais tu désires d’autres biens, libre à toi de les coquérir. »
–« Je ne désires rien de plus que ce que tu me propose, cher capitaine », dit Manawyddan; « Puisse le ciel te récompenser pour ton amitié. »
_ « Je serais toujours pour toi le meilleur ami du monde si tu le souhaites. » dit Pryderi.
_ « Je te le demande, mon ami, » dit Manawyddan, « et puisse le ciel te récompenser. Nous irons ensemble chercher Rhiannon et faire le tour de tes domaines »
_« Voilà une sage décision », répondit Pryderi. « Je crois, sincèrement, que tu n'as jamais entendu une dame discourir mieux qu'elle. De plus, quand elle était dans la fleur de l'âge, nulle n'était plus belle qu’elle. Et saches que l’âge n’a pas eu de prises sur son apparence ».
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Ils partirent donc.
Et peu nous importe la longueur de leur voyage, ils finirent par fouler les terres de Dyved, où un festin fut préparé par Rhiannon et Kicva pour fêter leur venue à Narberth. Manawyddan et Rhiannon s'assirent l’un près de l’autre et commencèrent à discuter, et pendant leur discussion l’esprit et les pensées de Manawyddan s’émerveillèrent des réparties de Rhiannon, et il ressentit jusqu’au fond de son coeur qu'il n'avait jamais connu de femme plus comblée de grâce et de beauté qu'elle.
_ « Pryderi » dit Manawyddan, « je veux qu'il soit fait comme tu l'as promis »
_« De quelle promesse est-il question ? » demanda Rhiannon.
_« Mère », dit Pryderi, « j’ai offert ta main à Manawyddan, fils de Llyr ».
_ « Cela me convient parfaitement », a déclaré Rhiannon.
_ « J’en suis très heureux moi aussi », a déclaré Manawyddan ; « Que le ciel récompense celui qui m'a témoigné une amitié aussi parfaite en agissant ainsi ».
Et avant la fin du festin, elle devint son épouse.
Pryderi dit :
_ « Restez ici jusqu’à la fin des festivités, c’et moi qui irai à Loegrie pour rendre hommage à Caswallawn, fils de Beli.
_« Seigneur », dit Rhiannon, « Caswallawn est actuellement dans le Kent, tu peux donc rester festoyer avec nous et attendre qu'il se rapproche d’ici. »
_ « J’attendrai », a-t-il répondu.
Ils terminèrent donc le festin. Puis ils décidèrent de faire le tour de Dyved pour chasser et prendre du bon temps. En parcourant le pays, ils se dirent qu’ils n'avaient jamais vu de terres plus agréables à vivre, ni de meilleurs terrains de chasse, ni de plus grande abondance de miel ou de poisson. Et l'amitié entre ces quatre-là était telle qu'ils ne se séparaient ni la nuit ni le jour.
Au milieu de tout cela, Pryderi se rendit à Oxford, pour rendre hommage à Caswallawn, où il fut chaleureusement accueilli et hautement félicité pour être venu offrir son hommage.
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Après son retour d’Oxford, Pryderi et Manawyddan ont repris leurs vies de plaisir.
Ils commencèrent par festoyer à Narberth qui méritait l’honneur de préséance, car c’était le palais principal, Quand ils eurent terminé le premier repas du soir, et pendant que les serviteurs mangeaient à leur tour, ils se levèrent, sortirent, et se rendirent tous les quatre au Cromlec’h de Narberth, où leur suite les suivit. Alors qu'ils étaient assis, il y eut un violent coup de tonnerre, suivi d’un nuage de brume si épaisse qu'aucun d'eux ne pouvait plus voir les autres. Quand la brume eut disparu, et que tout était redevenu clair tout autour d’eux, ils regardèrent vers l'endroit où ils avaient l'habitude de voir du bétail, des troupeaux, et des habitations. Mais ils ne voyaient plus rien ; ni maison, ni bête, ni fumée, ni feu, ni être humain, ni fermes, mais uniquement les bâtiments de la Cour qui étaient vides, déserts et inhabités, sans receler ni homme ni bête en eux. De plus, tous leurs compagnons avaient disparu eux aussi, sans qu'ils ne sachent rien de ce qui leur était arrivé. Il leur sembla qu’ils ne restait plus qu’eux quatre au monde.
_ « Au nom du ciel », s'écria Manawyddan, « que sont devenus les gens de la cour, ainsi que tout mon peuple ? Allons tirer cela au clair ».
C’est ainsi qu’ils entrèrent dans le château, mais ils ne trouvèrent personne. Puis ils traversèrent le château pour se rendre au dortoir, et là non plus ils ne virent aucun occupant. Ils fouillèrent ensuite tout le château jusqu’à la cave à hydromel et la cuisine ; ils n’y trouvèrent que la désolation. Alors ils décidèrent de festoyer tous les quatre, puis de chasser et de prendre leur plaisir. Ils commencèrent donc à parcourir le pays et tous les domaines qu'ils possédaient. Ils visitèrent les maisons et les fermes, et ne trouvèrent que des bêtes sauvages. Et quand ils eurent consommé toutes leurs provisions, ils se nourrirent des proies qu'ils tuaient à la chasse et du miel des essaims sauvages. Ils passèrent ainsi une première année agréable, puis une seconde, mais finalement ils commencèrent à se lasser.
_ « En vérité, dit Manawyddan, toute cette oisiveté me pèse, nous ne devons plus agir ainsi. Allons en Loegrie, et cherchons quelque métier qui nous permette de vivre. »
2_ L’exil en Loegrie
Ils entrèrent donc en Loegrie et s’arrêtèrent à Hereford, où ils se mirent à fabriquer des selles.
Manawyddan décida de fabriquer des arçons qu’il dorait et colorait avec de l'émail bleu, comme il avait vu faire par Llasar Llaesgywydd. Il travaillait si bien que son émail bleu semblait avoir été fait par Llasar Llaesgywydd lui-même. Email qui est toujours appelé Calch Llasar [émail bleu], parce que Llasar Llaesgywydd l'avait créé.
Le travail réalisé par Manawyddan était si beau, que plus une selle ou un arçon n'étaient achetés à un autre sellier dans tout Hereford. Quand les selliers s'aperçurent qu'ils perdaient une grande partie de leur gain, car plus personne ne les approchait à moins de ne pas pouvoir être servi par Manawyddan, ils se rassemblèrent et décidèrent de les tuer, lui et ses compagnons.
Heureusement, ils ont été avertis et ils se sont demandés s'ils devaient quitter la ville.
_ « Par le ciel », dit Pryderi, « je ne crois pas que nous devions quitter la ville, mais plutôt tuer ces rustres. »
_ « Que nenni, » dit Manawyddan, « si nous nous battons contre eux, nous aurons une mauvaise renommée et nous serons mis en prison. Il vaudrait mieux que nous partions dans une autre ville pour continuer à travailler. »
Ils sont donc partis tous les quatre vers une autre ville.
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« Quelle métier allons-nous faire? » demanda Pryderi.
_ « Nous allons fabriquer des boucliers », a déclaré Manawyddan.
_ « En serons-nous capables ? » demanda Pryderi.
_ « Nous allons essayer », répondit Manawyddan.
Ils se mirent donc à fabriquer des boucliers et les façonnèrent en reprenant la forme des meilleurs boucliers qu'ils avaient vus. Et ils les émaillèrent, comme ils l’avaient fait pour les selles. Ils prospérèrent en ce lieu, de sorte qu’il n’y eut bientôt pas un bouclier dans toute la ville, qui n’eut été fait par eux. Leur travail était rapide, et innombrables étaient les boucliers qu'ils fabriquaient. Mais ils se firent remarquer par les autres artisans, qui se rassemblèrent en hâte, appuyés par certains concitoyens, et décidèrent de les tuer. Par bonheur ils furent avertis que ces hommes avaient décidé leur mort.
_« Pryderi », dit Manawyddan, « ces hommes veulent nous tuer. »
_ « Ne nous laissons pas faire par ces rustres, mais tombons plutôt sur eux et tuons-les. » dit Pyderi
_ « Non, » répondit Manawyddan; « Caswallawn et ses hommes en entendront parler, et nous serons perdus. Allons dans une autre ville. »
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Alors ils sont allés dans une autre ville.
_« A quel métier allons-nous employer? » demanda Manawyddan.
_ « Reprenons une activité dans laquelle nous excellons », répondit Pryderi.
_ « Surtout pas », répondit Manawyddan, « nous devrions faire des chaussures, car les cordonniers seront trop lâches pour vouloir se battre avec nous ou pour nous molester ».
_ « Mais je ne connais rien à ce métier », a déclaré Pryderi.
_ « Moi je sais ! », répondit Manawyddan ; « et je t'apprendrai à coudre. Nous n'essaierons pas de tanner le cuir, mais nous l'achèterons tout tanné et nous fabriquerons des chaussures »
Manawyddan commença donc par acheter le meilleur cuir tanné qu'on pût voir en ville, et il n’achetait que ce cuir de grande qualité, sauf pour les semelles. Puis il s'associa avec le meilleur orfèvre de la ville, lui fit faire des boucles pour les souliers, et lui demanda de les dorer. Manawyddan observa le travail de l’orfèvre jusqu'à ce qu'il maîtrise ce savoir-faire. Et c'est ainsi que Manawyddan fit partie du clan très fermé des trois grands fabricants de souliers d'or. Dès lors, ceux qui pouvaient s’offrir des chaussures fabriquées par Manawyddan ne se rendaient plus chez l’un ou l’autre des cordonniers de la ville. Lorsque les cordonniers s'aperçurent que leurs gains diminuaient à vue d’oeil (car si Manawyddan façonnait les chaussures à la vitesse de l’éclair, Pryderi les cousait aussi rapidement), ils se sont réunis en conseil et ont convenu qu'ils leur fallait tuer ces deux opportuns.
_« Pryderi », déclara Manawyddan, « ces hommes sont déterminés à nous tuer ».
_« Pourquoi devrions-nous supporter cela de ces voleurs grossiers ? » répondit Pryderi. « Tuons-les tous, et n’en parlons plus »
_ « Que nenni», a déclaré Manawyddan, « nous ne les tuerons pas, et nous ne resterons pas non plus en Loegrie. Retournons en Dyved afin de savoir ce qui s’y passe ».
3_ Retour à Dyved
Ils voyagèrent donc jusqu'à ce qu'ils arrivent en Dyved, et ils se rendirent à Narberth. Arrivés là, ils ont allumé un feu et se sont nourris de leur chasse. Et ils passèrent un mois ainsi. Puis ils rassemblèrent leurs chiens autour d'eux, et y séjournèrent toute une année.
Un matin, Pryderi et Manawyddan se levèrent pour chasser, ils regroupèrent leurs chiens et sortirent du palais. Quelques-uns des chiens coururent devant eux et arrivèrent à un petit buisson qui était très proche. Mais dès qu'ils furent arrivés dans les broussailles, ils reculèrent précipitamment et revinrent vers les deux hommes, les poils hérissés par la peur.
_ « Approchons-nous du buisson », dit Pryderi, « et voyons ce qu'il y a dedans. »
Comme ils s'en approchaient, un sanglier d'un blanc immaculé sortit du buisson. Les chiens, encouragés par les hommes, se précipitèrent sur lui. Ce dernier s’éloigna du buisson, recula une première fois loin des deux hommes et fit face aux chiens sans reculer, jusqu'à ce que les hommes se soient approchés. Quand les hommes avancèrent, il recula une seconde fois, et prit la fuite. Les deux hommes poursuivirent le sanglier jusqu'à ce qu'ils voient un vaste et haut château, tous nouvellement construit, dans un endroit où ils n'avaient jamais vu auparavant ni pierre ni bâtiment. Le sanglier s’engouffra dans le château et les chiens le suivirent. Tandis que le sanglier et les chiens étaient dans le château, ils s'étonnaient de la présence de ce château dans un endroit où ils n'avaient jamais vu aucun bâtiment auparavant. Et du centre du Cromlec’h où ils se trouvaient, ils cherchaient et écoutaient les chiens. Mais tant qu'ils étaient là, ils n'entendirent aucun des chiens ni rien les concernant.
_ « Seigneur », a déclaré Pryderi, « je vais entrer dans le château à la recherche des chiens. »
_ « Crois-moi, » répondit Manawyddan, « il est imprudent d'entrer dans ce château que tu n'as jamais vu jusqu'à présent. Je te conseille de ne pas y entrer. Je suis convaincu que quelqu’un a jeté un sort sur cette terre et a fait apparaître ce château ici. »
_ « Sur mon honneur », répondit Pryderi, « je ne peux pas ainsi abandonner mes chiens. »
Et malgré tous les conseils que Manawyddan lui a prodigué, il est allé vers le château.
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Lorsqu'il entra dans le château il ne vit ni homme, ni bête, ni sanglier, ni chien, ni habitation. Mais au centre de la cour du château, il vit une fontaine en marbre. A coté de la fontaine il y avait une dalle de marbre où était posée une coupe en or. Il y avait aussi des chaînes dont il ne voyait pas le bout qui montaient vers le ciel.
Pryderi fut ébloui par la beauté de l'or et par la finesse du travail de la coupe. Il s'approcha de la coupe et s'en saisit. Mais quand il l'eut saisie, ses mains se collèrent à la coupe, et ses pieds à la dalle sur laquelle la coupe était posée. Toutes ses forces l’abandonnèrent et il ne put même pas appeler à l’aide. Il resta là, immobile tel une statue.
Manawyddan l'attendit jusqu'à la fin du jour. Très tard dans la soirée, se disant qu'il n'aurait aucune nouvelle de Pryderi ou des chiens, il retourna au palais. Quand il y entra, Rhiannon le regarda.
_«Où sont ton compagnon et tes chiens?» dit-elle.
_ « Ecoutes, » répondit-il, « l'aventure qui m'est arrivée. »
Et il lui raconta tout.
_ « Tu as été un mauvais compagnon » dit Rhiannon, « et tu as perdu un bon compagnon ».
Et sur ces paroles elle sortit et se dirigea vers le château en suivant la direction que Manawyddan lui avait donnée. Elle trouva la porte du château ouverte. Rhiannon n'était pas timide, et elle entra. Et comme elle entrait, elle aperçut Pryderi tenant la coupe, et elle se dirigea vers lui.
_ « Oh, monseigneur », dit-elle, « que faites-vous ici ? »
Elle voulut lui retirer la coupe des mains, mais pendant qu'elle le faisait, ses mains à elle se collèrent à la coupe et ses pieds à la dalle, et elle ne put prononcer un seul mot. A ce moment, la nuit tomba, la foudre les frappa et un nuage de brume les enveloppa. Puis le château disparut, les emportant avec lui.
4 _ Manawyddan et Kicva
Lorsque Kicva, la fille de Gwynn Gloyw, se retrouva seule dans le palais avec Manawyddan, elle fut tellement affligée qu'elle voulut mourir. Voyant cela, Manawyddan lui dit :
_. « J’espère, » dit-il, « que ce n’est pas par peur de moi que tu es si affligée. Je prends le ciel à témoin que jamais avant ce jour, tu n'as connu d'amitié aussi pure que celle que je te porte. Et je te la porterai tant que les dieux me prêteront vie. Je te déclare aussi qu’au temps de ma jeunesse, j’étais lié d’amitié avec Pryderi, et que cette amitié je te la donne aussi »
_ « . Ne t'inquiète donc pas, » dajouta-t-il, « car le Ciel m'est témoin que tu trouveras en moi toute l'amitié que tu pourras désirer. Et que j’userai de toutes mes forces pour te le prouver, tant que le Ciel aura décidé de nous maintenir dans ce chagrin et ce malheur. »
_ « Le ciel te bénisse, dit-elle, je n’en attendais pas moins de toi ».
Et la demoiselle reprit courage et se réjouit.
_ « En vérité, madame », déclara Manawyddan, « Nous ne pouvons pas rester ici. Nous avons perdu nos chiens et nous ne pouvons donc pas chasser pour nous nourrir. Allons à Lloegyr ; il sera plus facile pour nous de subvenir à nos besoins là-bas. »
_ « Avec plaisir, seigneur, dit-elle, allons-y. »
Et ils partirent ensemble pour Lloegyr.
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_ «Seigneur, dit Kicva, quel métier vas-tu faire? Choisis-en un qui soit convenable. »
_ « Je ne prendrai pas d'autre métier, » répondit-il, « que celui qui consiste à faire des souliers, comme je le faisais autrefois. »
_ «Seigneur, dit-elle, un tel métier ne convient pas un homme de ton rang.»
_ « Cependant, je m'en tiendrai à mon idée », répondit Manawyddan.
C’est ainsi qu’il commença son activité. Il ne travailla que le cuir le plus fin qu'il put se procurer dans la ville. Et, ainsi qu’il l'avait déjà fait ailleurs, il fit confectionner des boucles dorées pour les souliers. Et à part lui, tous les cordonniers de la ville étaient oisifs et sans travail. Tant qu'on pouvait se fournir chez lui, ni chaussures ni bottes n'étaient achetés ailleurs. Ils restèrent là un an, jusqu'à ce que les cordonniers deviennent envieux et tiennent un conseil à son sujet. Manawyddan en fut averti. On lui raconta que les cordonniers s'étaient mis d'accord pour le tuer.
_ « Seigneur », dit Kicva, « Pouvez-vous supporter tout cela de la part de ces rustres ? »
_ « Non, » dit-il, « retournons à Dyved. »
Et ils se mirent immédiatement en route vers Dyved.
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Quand Manawyddan se mit en route pour retourner à Dyved, il emporta avec lui un sac de blé. Il se dirigea vers Narberth, et demeura là. Jamais il ne fut plus heureux que lorsqu'il revit Narberth et les terres où il avait coutume de chasser avec Pryderi et avec Rhiannon. Il passait son temps à pêcher et à chasser le cerf. Puis il a commencé à travailler la terre, et il a semé de quoi faire une récolte, puis une seconde, et une troisième. Jamais dans ce monde blé n'a poussé aussi bien. Les trois semailles prospérèrent dans une croissance parfaite, et jamais personne n'a jamais vu de blé plus beau que celui de Manawyddan.
Et ainsi passèrent les saisons de l'année jusqu'au temps de la moisson. Manawyddan se rendit sur une de ses parcelles, et vit qu'elle était mûre.
_ « Je récolterai cela demain, » se dit-il.
Cette nuit-là, il retourna à Narberth, et le lendemain, dans l'aube grise, il se leva pour aller récolter sa parcelle. Mais quand il y arriva, il ne trouva que la paille nue. Chacun des épis de blé avait été coupé de la tige. Tous les épis avaient été emportés, et il ne restait que la paille. Voyant cela, Manawyddan s'énerva beaucoup.
Alors il alla voir la deuxième parcelle, et vit qu'elle aussi était mûre.
_ « Très bien, » dit-il, « je la récolterai demain. »
Et le lendemain, il est venu avec l'intention de récolter. Mais quand il est arrivé sur le champ, il n'a trouvé que la paille nue.
_ « Oh, ciel tout puissant, » s'écria-t-il, « je crois que quelqu’un a juré ma perte et la ruine du pays avec moi ».
Manawyddan alla voir la troisième semaille ; Quand il y arriva, il y vit le blé le plus tendre de toute la terre, et celui-ci aussi était mûr.
_ « Le diable m’emporte », dit-il, « si je ne veille pas ici ce soir. Celui qui a emporté le blé de mes autres parcelles viendra certainement voler celui-ci. Et je saurai qui c'est. »
Alors il alla prendre ses armes afin de surveiller le champ. Et il raconta à Kicva tout ce qui s'était passé.
_ « Que comptes-tu faire ? » lui demanda-t-elle,
_ « Je surveillerai cette semaille toute la nuit, » dit-il.
Manawyddan est donc retourné surveiller son champ. Et vers minuit, il entendit un tumulte assourdissant, le plus bruyant qu’il n’ait jamais entendu. Manawyddan scruta l’horizon, et vit la plus puissante troupe de souris du monde. Il y en avait tellement qu’on ne pouvait les dénombrer. Manawyddan ne comprit pas ce qui allait arriver jusqu'à ce que les souris aient pénétré dans le champ. Chacune d'elles grimpa sur une tige de blé, en le pliant sous son poids, puis coupa l’épi de blé pour l’emporter en ne laissant là que la tige nue. Manawyddan ne vit pas une seule tige qui ne fut rongée par une souris. Puis les souris repartirent, emportant les épis avec elles.
Emporté par la fureur et la colère, Manawyddan se précipita sur les souris, mais il s’acharnait en vain comme s'il poursuivait des moucherons ou des oiseaux dans les airs. Finalement, il en vit une qui était plus lente. Mais bien qu'elle soit lente, elle allait si vite qu'un homme aurait eu beaucoup de peine à la rattraper à la course. Manawyddan se lança à sa poursuite, l'attrapa et l’enferma dans son gant dont il attacha l'ouverture avec une ficelle. Tenant le gant dans sa main, Manawyddan retourna dans son palais. Quand il arriva dans la pièce où se trouvait Kicva, Manawyddan alluma un feu et suspendit le gant par la ficelle à un crochet.
5 _ Manawyddan et Llwyd, fils de Kilcoed
_ « Qu'as-tu ramené là, seigneur ? » demanda Kicva.
_ « Un voleur, » dit-il, « Voleur, que j'ai surpris en train de me voler mon blé. »
_ « Quel genre de voleur est-ce, seigneur, que tu puisses le mettre dans ton gant ? » répondit-elle.
_ « Ecoutes-moi bien, je vais tout te raconter », a-t-il répondu.
Alors Manawyddan expliqua comment il avait trouvé ses champs dévastés et les récoltes détruites. Puis comment les souris arrivèrent dans le dernier des champs et l’ont dévasté devant ses yeux.
_ « Mais l'une d'elles était moins agile que les autres, et elle est maintenant dans mon gant. Demain je la pendrai, et je jure devant le tout puissant que si je les avais toutes attrapées, je les pendrais toutes. »
_ « Monseigneur, » dit-elle, « Cette histoire me parait extraordinaire. Mais je dois vous avertir qu’il serait inconvenant pour un homme de votre rang de pendre une telle vermine. Vous feriez bien mieux de ne pas vous souiller avec cette créature. Laissez-là plutôt partir. »
_ « Tais-toi », dit-il, « je les aurai toutes pendues si j’avais pu les attraper toutes. Mais voila ; je n’en ai eu qu’une et je la pendrai. »
_ « En vérité, seigneur, » dit Kicva, « il n'y a aucune raison pour que je prenne la défense de cette vermine, si ce n’est pour éviter que tu te discrédites. Mais qu’il soit fait selon ta volonté. »
_ « S’il y avait une seule raison valable pour que tu puisses prendre sa défense, je suivrais ton conseil sans hésiter », dit Manawyddan, « mais comme je n'en connais pas une seule, j'ai bien l'intention de la détruire. »
_ « Dans ce cas, faites selon votre volonté, » dit Kicva.
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Manawyddan, emportant la souris avec lui, se rendit au Cromlec’h de Narberth où il a installé deux fourches patibulaires sur la partie la plus élevée de la colline. Pendant qu'il faisait cela, il vit venir à lui un clerc d’église vêtu de vieux vêtements en lambeaux. Or cela faisait maintenant sept ans qu'il n'avait vu en cet endroit ni homme ni bête. La dernière fois qu’il y était venu, ils étaient quatre compagnons soudés comme les doigts de la main jusqu'à ce que deux d'entre eux disparaissent.
_ « Bonjour à vous, Monseigneur », dit le clerc.
_ « Que le ciel te protège. Je te salue à mon tour. Mais d'où viens-tu, clerc ? demanda Manawyddan.
_ « Je viens, seigneur, de chanter à Lloegyr. Mais pourquoi cette question ? »
_ « Parce que cela fait sept ans, » répondit Manawyddan, « qu’on n’a vu personne passer par ici, depuis que quatre personnes unies par l’amitié s’y sont assemblés. Et voici, qu’aujourd’hui un être humain passe par ici. Et je me demande pourquoi ce premier homme c’est toi.»
_ « En vérité, seigneur, » répondit le clerc, « je traverse ce pays uniquement pour rentrer chez moi. Mais qu’êtes-vous en train de faire, seigneur ? »
_ « Je suis en train de pendre un voleur que j'ai surpris en train dans mes champs », dit Manawyddan
_ « Quel genre de voleur est-ce ? » demanda le clerc d’église. « Je ne vois dans ta main qu’une créature semblable à une souris. Et il n’est pas convenable pour un homme de ton rang de toucher une telle vermine. Rends lui sa liberté ».
_ « Je ne la laisserai pas repartir libre, par le ciel, » répondit Manawyddan; « Je l'ai attrapée en train de me voler, et je lui infligerai le sort réservé aux voleurs : Je vais la pendre ».
_ « Seigneur, » dit le clerc, « plutôt que de voir un homme de votre rang s’abaisser à une tâche comme celle-ci, je préfère vous donner la pièce d’une livre que j'ai reçue en aumône en échange de la liberté de cette vermine »
_ « Il est hors de question que je lui rende sa liberté » dit Manawyddan, « Il n’est pas question non plus que je te la vende.»
_ « Comme vous voudrez, seigneur, » répondit-il ; «À part le fait que je ne peux pas voir un homme de votre rang toucher un telle bestiole, le sort de la souris m’importe peu. »
Et le clerc d’église poursuivit son chemin.
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Comme Manawyddan plaçait la traverse sur les deux fourches, voici qu'un prêtre s'avança vers lui, monté sur un cheval caparaçonné.
_ «Bonjour à toi, seigneur, » dit le prêtre.
_ « Que le ciel te protège, » dit Manawyddan ; « me donneras-tu ta bénédiction ? ».
_ « La bénédiction du ciel soit sur toi. Mais que fais-tu, seigneur ? »
_ « Je suis en train de pendre un voleur que j'ai surpris en train de me vdépouiller», dit Manawyddan.
_ « Quel genre de voleur, est-ce ? » demanda le prêtre
_ « Ce voleur », répondit Manawyddan, « a pris l’apparence d'une souris. Il m'a volé, et je lui inflige le sort réservé aux voleurs . »
_ « Seigneur, » dit le prêtre, « afin de t’éviter de toucher cette vermine, je t’achètes sa liberté. »
_ « Par tous les saints qui sont au ciel, jamais je ne la vendrai ni ne lui rendrai sa liberté. »
_ « Il est vrai, seigneur, qu’elle n’a aucune valeur marchande. Mais plutôt que de te voir te souiller en touchant un tel animal, je te donne trois livres pour sa liberté »
_ « Comprenez-moi bien,» dit Manawyddan, « Je ne veux aucun argent pour ce voleur. Il subira le sort de tous les voleurs, et sera pendu. »
_ « Et bien, seigneur, fais selon ton bon plaisir. »
Et le prêtre s'en alla.
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Alors Manawyddan noua une ficelle autour du cou de la souris, et comme il allait la pendre, il vit arriver un évêque avec sa suite, ses chevaux de charge et ses serviteurs. L'évêque en personne vint vers lui, mais Manawyddan est resté occupé à sa tâche.
_ « Seigneur évêque, » dit-il, « que Dieu te bénisse. »
_ « La bénédiction du ciel soit sur toi », répondit l’évêque. « Mais qu’es-tu en train de faire ? »
_ « Je pends un scélérat que j'ai surpris en train de me voler », a déclaré Manawyddan.
_ « N'est-ce pas une souris que je vois dans ta main ? »
_ « OAbsolument, » répondit-il. « Et c’est elle qui m'a volé. »
_ « Ecoutes, » dit l’évêque, « puisque je suis arrivé juste avant la mort de cette vermine, je te propose de la racheter. Je te donnerai sept livres pour cela. Car je serai peiné de voir un homme d'un rang égal au tien détruire un petit être aussi vil que celui-ci. Lâche-la et tu auras l'argent »
_ « Je déclare devant Dieu que je ne la lâcherai pas. »
_ « Si tu estimes que sept livres ne suffisent pas, je te donnerai vingt-quatre livres en argent comptant pour la libérer. »
_ « Par le Ciel, je ne la libérerai pas même pour cette somme », a déclaré Manawyddan.
_ « Si cette somme ne suffit pas, je veux bien te donner tous les chevaux que tu vois dans cette plaine, et les sept charges de bagages, et les sept chevaux qui les transportent. »
_ « Par tous les saints du ciel, il n’en est pas question », a répondu Manawyddan.
_ « Puisque ma proposition ne te suffit pas, dis-moi quel est ton prix. »
_ « Dans ce cas, écoutez-moi bien », dit-il. « Il faut que Rhiannon et Pryderi retrouvent la liberté.
_ « Tu auras leur liberté», répondit l’évêque.
_ « Mais, Dieu m’est témoin, cela ne suffit pas encore pour que je libère la souris. »
_ « Que veux-tu donc de plus ? »
_ « Je veux que les sept Cantrevs de Dyved soient libérés du charme qui les accable. »
_ « Cela tu l'auras aussi. Libère donc la souris ».
_ « Par le ciel, je ne libérerai pas la souris tant que je ne saurai pas qui elle est en vérité,», dit Manawyddan
_ « C’est ma femme. » répondit l’évêque.
_ « Même si ce que vous me dîtes est vrai, je ne la libérerai pas tant que je ne saurais pas pourquoi est-elle venue à moi ? »
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_ « Elle est venue pour te dépouiller », répondit l’évêque. « Je suis Llwyd, fils de Kilcoed, et c'est moi qui ai jeté le sort sur les sept Cantrev de Dyved. Je l’ai fait pour venger Gwawl le fils de Clud, au nom de l'amitié que j'avais pour lui. »
_ « En faisant disparaître Pryderi j'ai aussi vengé Gwawl, le fils de Clud, de la partie de « Badger in the Bag », que Pwyll Pen Annwvyn a fait jouer à la cour de Heveydd Hên après avoir enfermé Gwawl dans le sac à la place du blaireau »
_ « Quand le bruit a couru que tu étais venu habiter dans le pays, mes gens vinrent me supplier de les transformer en souris, afin de détruire tout ton blé. Et toute ma maisonnée est partie la première nuit. Et la deuxième nuit aussi ils partirent et détruisirent ta deuxième récolte. La troisième nuit, ma femme et les dames de la cour vinrent me demander d’être transformées elles aussi. Et j’ai accédé à leurs vœux. Mais ma femme est enceinte. Si elle n'avait pas été enceinte, tu n'aurais jamais pu la rattraper. Mais puisqu'elle a été capturée, je te rendrai Pryderi et Rhiannon en échange de sa vie. Et je retirerai le sort que j’ai jeté sur Dyved. Maintenant que tu sais qui elle est. Libéres-la donc. »
_ « Je ne la libérerai pas. Pas encore !», dit Manawyddan.
_ « Que veux-tu de plus ? » a demandé Llwyd, fils de Kilcoed.
_ « Je veux que tu promettes qu'il n'y aura jamais plus de charme lancé contre les sept Cantrevs de Dyved. »
_ « Cela aussi, je te le promets, » dit-il. « Maintenant, libères la. »
_ « Je ne le ferai pas encore», a répondu Manawyddan.
_ « Que veux-tu de plus ? » demanda Llwyd.
_ «Voici ce que j’exige, » dit Manawyddan « j’exige; que tu ne te venges jamais de la capture de ta femme, ni sur Pryderi, ni sur Rhiannon, ni sur moi-même. »
_ « Tout cela je te l’accorde. En vérité tu as agi avec beaucoup de sagesse en demandant cela. Sinon je n’aurais pas hésité une seconde à jeter un sort sur ta tête. »
_ « En effet, » dit Manawyddan, « C’est par crainte de cela, que je t’ai fait cette demande. »
_ « Rends maintenant la liberté à ma femme. »
_ « Dieu m’est témoin que je ne le ferai pas,», dit-il, « tant que je n’aurais pas vu Pryderi et Rhiannon libres, près de moi. »
_ « Les voici, ils arrivent », a répondu Llwyd.
A cet instant Pryderi et Rhiannon apparurent.
Manawyddan se leva, alla leur rencontre, les salua et s'assit à côté d'eux.
_« Seigneur, rendez maintenant la liberté à ma femme», dit l'évêque. « N'avez-vous pas obtenu tout ce que vous avez demandé ? »
_ « Je la relâche volontiers, dit Manawyddan.
Et là-dessus, il la libéra.
Puis Llwyd frappa la tête de la souris avec sa baguette magique et elle redevint une jeune femme, la plus belle jamais vue.
_ « Regarde autour de toi, Manawyddan. Regarde ton pays », dit Llwyd, « et tu le verras cultivé et peuplé, comme il était dans ses meilleurs jours. »
Manawyddan se leva et regarda droit devant lui. Et il vit toutes les terres labourées, pleines de troupeaux et d'habitations.
_ « Mais à quelles servitudes, ont été soumis Pryderi et Rhiannon durant leur captivité? » demanda Manawyddan
_ « Pryderi a eu les heurtoirs de la porte de mon palais accrochés à son cou, et Rhiannon a, elle, porté autour de son cou les licous des ânes chargés de la corvée de foin. Voilà quel a été leur sort pendant leur captivité. »
Et en raison de cet asservissement, cette histoire est appelée le Mabinogi de Mynnweir et Mynord.
Et c’est ainsi que se termine cette partie du Mabinogi.
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Date de dernière mise à jour : 22/12/2021